mardi 28 octobre 2014

L'Origine du Blues : un premier extrait !



 
Auteur d'Un os à ronger (collection Le Riffle), Marc Falvo ajoute à sa bibliographie un nouveau roman : L'origine du blues.
Un polar musical et bicéphale. Un polar, pas plus, pas moins. Noir jusqu’au bout des ongles. Et c'est dans votre collection Riffle Noir !
  












PREMIER EXTRAIT

Prologue

Les persuadés





La première fois que Bruno et Bélial King ont bossé ensemble, c’était au collège. L’un a triché sur l’autre – on n’a jamais su lequel – et ils se sont fait choper tous les deux.

Dans le bureau du proviseur, Bélial, quatorze ans, a blâmé la fatalité, les avanies du système scolaire, un cruel alignement de planètes. Bruno déjà, préférait le silence. Leur problème a été réglé avec une paire de baffes et quelques heures de colle. En sortant du bureau, ils se sont assis sur un banc, honteux, surtout en colère.

– Pas exactement… 
– Exactement…
– PAS exactement. 
– C’est-à-dire ? 
– T’es pas exactement un enfoiré. 

Bruno s’est jeté sur Bélial. Ils se sont battus. Bélial a gagné.

Ce genre de traquenard crée des liens. Les ados, d’humeur solitaire – l’un par choix, l’autre par défaut – sont devenus inséparables. Ont collectionné petites joies et grandes déconvenues et jamais ils n’auraient nié que leur duo, malgré certaines différences, les rendait plus forts, au moins dans les bagarres, l’appréhension de la puberté, cette vie en général.

A quinze ans, Bélial sortait sa première fille, plus âgée de deux classes. Une rousse. Bruno a tenu la chandelle, en plus le film était une daube. A seize ans, Bruno conduisait. Il prenait la voiture de son père et s’offrait de longues balades en solo. A dix-sept, après avoir lu Le grand sommeil de Chandler, Bélial s’est acheté un vieil imperméable. Certains élèves, dont une paire de terminales, ont ri. Il a perfectionné son crochet du gauche.
– Pas exactement… 
– Exactement…
– PAS exactement. 
– C’est-à-dire ?
– Quand même, il est pas exactement à ta taille…

Bélial s’est jeté sur Bruno. Ils se sont battus. Bélial a gagné.

Bien sûr, King n’est pas leur vrai nom.

Clause de style, rien de plus. Leroy et Leroi pour un cabinet de détectives, ça faisait un peu trop prime time du lundi soir sur TF1 alors les deux jeunes mecs ont cherché quelque chose de plus classe lorsque s’est présentée la chance de réaliser enfin leur rêve, après des bacs moyens et deux cursus universitaires avortés. S’associer contre le crime et surtout pour la gloire, gavés qu’ils étaient de films, romans noirs et séries policières.

Sous leurs noms en lettres d’or, la plaque du bureau portait l’inscription :

The thrill is gone

Hommage à leur bluesman favori. La déférence courait jusqu’au patronyme. Bruno et Bélial King. Initiales B.B. King. The thrill is gone. C’était plutôt cohérent.

A vingt-cinq ans donc, Bruno et Bélial ouvraient leur cabinet.

A vingt-sept ans, ils rencontraient Dina mais c’est une autre histoire.

A vingt-huit ans, le cabinet fermait.

Pourri par les dettes, la routine crasse et le malheur. Encore une fois, Bélial a crié au loup, à leur géographie hasardeuse, c’est vrai qu’on était loin de Boston, Los Angeles, New York, il a encore mis ce foutu alignement de planètes sur la table. Lille, le Nord n’étaient juste pas assez grands ni assez biens pour eux. Bruno est parti. Bélial a voulu continuer seul, et donc s’est planté seul, une seconde fois. Bruno est devenu taxi, Bélial journaliste – pour rentabiliser son appareil photo – et ils ne se parlaient plus, ne se voyaient guère, se seraient ignorés au plus profond de l’abîme… Cette histoire commence à l’aube de leurs trente-et-un ans.

Alors que la métropole lilloise engourdie se prépare à fêter la naissance d’un barbu prophétique et qu’un pauvre type se fait salement buter dans la luxueuse suite d’un palace de province. Etouffé, émasculé, ligoté au lit King size, cloué par une tige d’acier inoxydable à ce même lit. Sur le ventre. Planté. Epinglé. Avec, mutilant son dos nu, un sordide et curieux tatouage… Tête de mort. Gravée. A la pointe de couteau, et sans anesthésie. Aucun doute, c’était une offrande de taille à la froide saison naissante, une sacrée nouveauté au catalogue automne-hiver des cinglés. Sans compter les trois mots, Bye Bye Butterfly, écrits sur le mur blanc de la chambre avec le propre sang du mort, calligraphiés par un tueur qui juste après a disparu, bien sûr, seul dans la nuit déserte… Envolé. Dissipé. Une ombre.

Imaginez les cris de la femme de chambre, au petit matin. Cette employée modeste chargée du réveil de la star, coqueluche des salons, toujours entre deux trains, deux cocktails, habituée à recevoir les honneurs, de sa région d’abord puis du pays entier.

Le sang. Partout. Le corps meurtri.

Les draps souillés, et cette expression de terreur.

Je vais mourir.

Voilà ce que les yeux révulsés du cadavre hurlaient.

Là, tout de suite, je suis juste en train de passer à l’as.

La femme de chambre en a lâché son plateau d’argent, qui s’est écrasé au sol. Le pot de café noir s’est répandu sur la moquette, deux toasts dorés à point se sont brisés en mille miettes et le beurre a fondu. Les croissants chauds ont eu le temps de refroidir.

Un cri strident, puis un autre.

Une course précipitée.

La pauvre femme de chambre hurlait à tout rompre, elle a réveillé la moitié de l’étage. Les autres résidents n’osaient plus ouvrir leurs portes. Quelqu’un a appelé la police. En revanche, personne n’a appelé les paparazzis mais ils sont venus quand même. 


Bientôt, un second extrait !




 Toutes les dates de dédicaces de Marc Falvo sont sur notre blog.



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